Afrique Asie n° 107 - Octobre 2014 - Page 1 - magazine de politique, économie, questions de société, culture concernant les pays d'Afrique subsaharienne, Maghreb, Moyen Orient, Golfe, Amériques, Asie DANS LES BACS ET EN TÉLÉCHARGEMENT LE 22 SEPTEMBRE TOUSLESTUBESLESPLUSCHAUDS! MAGIC SYSTEM BONGA YOUSSOUPHA BLACK BAZAR PASSI JESSY MATADOR ALPHABLONDYFALLYIPUPATIKENJAHFAKOLYPSQUARECLAYTONHAMILTON… INCLUS: «1ER GAOU»LE NOUVEAUSINGLEDEBANAC4 PRÉSENTE 2CD36TITRES DES CHIFFRES… 6 milliards d’euros. C’est le coût de la reconstruction de la bande de Gaza estimé par des experts palestiniens, à la suite des dernières attaques israéliennes. Elle pourrait durer cinq ans, à condition que le blocus imposé par Israël soit totalement levé. C’est la troisième fois en quelques années que les donateurs internationaux sont appelés à financier la reconstruction de Gaza après des attaques israéliennes. Israël ne déboursera pas un centime.I 2325 milliardaires ont été comptabilisés dans le monde en 2014. 155 nouveaux figurent dans la liste, soit une augmentation de 7 %, selon la banque suisse USB. Avec un cumul de 7300 milliards de dollars, en progression de 12 %. L’Asie représente les plus grosses fortunes, avec 52 nouveaux milliardaires, dont 33 en Chine; l’Europe est en tête (775), et les États-Unis se placent au premier rang par pays, avec 551 milliardaires. 20 % de la richesse globale se concentre dans vingt grandes villes, New York, Moscou et Hongkong en tête.I …ET DES MOTS Q « J’admets avoir commis une erreur en collaborant avec le service de police politique [français] qu’est l’antiterrorisme. Cela va à l’opposé des positions et des combats que représente mon engagement de journaliste. Je m’en excuse auprès des familles de ceux que cette négligence a mis en danger. »I Pierre Torres, journaliste, ancien otage en Syrie. Q « Il s’agit de coques non armées. Si les Russes veulent en faire un hôpital, ils mettront des lits; s’ils veulent en faire un portehélicoptères, ils mettront des hélicoptères. À titre personnel, j’estime que ces contrats signés doivent être exécutés. Jusqu’à nouvel ordre, la France est un pays souverain! »I Jean-Pierre Chevènement, représentant spécial de la France auprès de la Russie en matière de diplomatie économique. Q « Nous avons aujourd’hui plus de prisonniers qu’en Corée du Nord, plus de policiers qu’en Allemagne en 1938. […] Si vous demandez un procès équitable avec un jury aux États-Unis, vous passez plus de temps en prison que si vous avouez un meurtre. »I John McTiernan, réalisateur américain, emprisonné dix mois pour avoir menti au FBI. Yémen: exit l’Arabie Saoudite Le roi Ibn Seoud, fondateur de l’actuel royaume wahhabite, n’avait pas tort de conseiller à ses fils la plus grande suspicion à l’égard du Yémen voisin à qui il venait d’arracher trois provinces verdoyantes (Assir, Jizane et Najrane), qu’il annexa en 1932. Malgré le renoncement définitif de l’ancien président Ali Abdallah Saleh aux droits historiques du Yémen sur ces provinces, en contrepartie de larges subsides, cette annexion est toujours mal digérée par les Yéménites. Le lâchage par les monarchies du Golfe, menées par l’Arabie Saoudite, de leur « allié » Saleh, qui avait réussi à maintenir la stabilité de ce pays pendant plus de trois décennies, a ouvert une boîte de Pandore 3Continents Octobre 2014 G afrique asie sur leur flanc sud. L’Iran, désigné par ces mêmes monarchies comme l’ennemi à abattre, en a profité pour s’imposer à travers la révolte houthite qu’il a soutenue et armée. Issue de la communauté zaydite (40 % de la population), le mouvement dirigé par Abdelmalek Al-Houthi, appelé Ansarullah (les « Partisans de Dieu »), se présente comme un mouvement réformateur, rassembleur et résolument hostile aux ingérences étrangères. D’autant plus qu’avec la chute de Saleh, le pouvoir avait échu, après un simulacre d’élections, à son adjoint Abed Rabbo Mansour Hadi, un homme sans envergure, marionnette des islamistes d’Al-Islah, du clan Al-Ahmar et des Saoudiens. En s’emparant, le 20 septembre, de la capitale Sanaa, les Houthis ont mis fin à l’ordre saoudien au Yémen. Soutenus par les sécessionnistes du Sud, et profitant de la complicité de l’ancien président déchu, ils devront faire face à de redoutables défis, notamment le défi tribal et celui que représente Al-Qaïda, bien enraciné dans Hadramaout, la région natale d’un certain Ben Laden… L’Arabie heureuse n’a vraiment pas de chance.I D. R. L’Union africaine veut séduire les Touaregs Lors de sa réunion du 16 septembre, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a lancé un appel aux mouvements armés maliens pour qu’ils harmonisent et assouplissent leurs positions dans les pourparlers inclusifs se déroulant à Alger, sous l’égide de l’Algérie et des pays de la sous-région. Le Conseil les a appelés à trouver une solution équitable et durable qui pourrait conduire ces combattants à collaborer au processus de Nouakchott, mis en place par l’Union africaine, prévoyant la coopération de tous les pays sahéliens dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent. En effet, les Touaregs sont les meilleurs connaisseurs du désert du Sahara et peuvent constituer de précieux atouts.I 4 Continents Octobre 2014 G afrique asie PROFIL HAUT… Alibaba, la société chinoise de commerce en ligne, est devenue la plus grosse introduction en Bourse du monde, en choisissant de se faire coter à Wall Street le 19 septembre. La valorisation de 168 milliards de dollars, reflétée par le prix de vente des actions, fait d’elle le numéro trois du secteur Internet derrière Google et Facebook. L’immensité du marché chinois lui a déjà permis de réaliser 248 milliards de dollars de transactions l’an passé. Sa cotation lui donne désormais une visibilité importante qui l’aidera à se développer à l’international.I Alain Marsaud, député UMP des Français de l’étranger et ancien juge antiterroriste, considère que l'intervention de la France en Irak est une « erreur ». Elle fait de notre pays « la cible n° 1 » des djihadistes. « Nous sommes le maillon faible, nous sommes engagés avec trois ou quatre avions Rafale sur la zone, la France n'a pas la capacité de défense, y compris de ses concitoyens à l'étranger, qu'ont les Américains… Ce sont les Américains qui sont responsables de cette situation, ils ont la capacité, eux, de faire le travail tout seuls », a-t-il déclaré.I Francophonie: abondance de candidats ne nuit pas, selon Buyoya L’ancien président burundais Pierre Buyoya (photo) est candidat à la succession du Sénégalais Abdou Diouf au poste de secrétaire général de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), qui sera décidée lors du prochain sommet des États membres (57) et associés (20) à Dakar, les 29 et 30 novembre. Il se félicite du nombre de prétendants (6). « La Francophonie soulève des ambitions », se réjouit-il, y voyant un signe de dynamisme. Mais la bataille n’est pas gagnée. Face à lui, il y a quatre autres candidats africains. Dernier à s’être déclaré le 15 août, le neurologue Tharcisse Loseke, présenté par Kinshasa, qui rêve d’un visa francophone pour faciliter la libre circulation entre les 77 États membres, fait figure d’outsider. L’écrivain et diplomate Henri Lopes, ancien premier ministre, dont la candidature est présentée par Brazzaville, n’a pas fait beaucoup campagne, contrairement à Buyoya qui fait valoir son expérience au sein des missions de résolution des conflits, au Sahel et au Soudan du Sud notamment. Mais ses Recensement birman: la preuve par 9 Soyons précis: « Le résultat préliminaire [du recensement] fait état de 51419420 habitants au Myanmar », annonçait fin août la ministre de l’Immigration Khin Yi. Ce chiffre étonne. Avant ce recensement, la population du Myanmar était estimée à 60 millions. Où sont donc passées les 8,6 millions manquant à l’appel ? Les réponses sont multiples. Tout d’abord, tous les foyers n’ont pas été visités, notamment dans les États Kachin et Karen en guerre, mais aussi dans l’État Rakhine. À la dernière minute, le gouvernement a décrété que D. R. La diaspora somalienne prend son destin en main Trente-deux entrepreneurs somaliens se sont rassemblés à Londres, le 21 septembre dernier, pour une convention intitulée Fiiri Bandhiga, qui visait à mieux faire connaître et à développer leurs activités. L’événement a été organisé par Asli Ciyow, jeune Franco-Somalienne qui a travaillé dans la production audiovisuelle avant de créer sa propre société, Ya-Kalé. Fiiri Bandhiga a offert une image renouvelée de la Somalie en montrant comment de jeunes entrepreneurs issus de ce pays en crise et en guerre depuis des décennies peuvent se rassembler et créer un réseau international pleinement intégré dans le monde actuel, dans des domaines aussi divers que la mode, la cuisine, les médias ou l’agriculture.I les Rohingyas, la minorité musulmane non reconnue en tant qu’ethnie de l’État Rakhine, devaient se déclarer en tant que « Bengalis », autant dire en tant qu’étrangers illégaux venus du Bangladesh. Les intéressés ont rejeté l’appellation et se sont identifiés en tant que Rohingyas. En entendant ce mot, les recenseurs ont tout simplement tourné les talons, laissant cette ethnie qui n’existe pas en dehors des décomptes. Ainsi, quelque 1,2 million de personnes n’ont pas été prises en compte dans les États Karen, Kachine et Rakhine. Ensuite, le recensement n’inclut pas les migrants illégaux de Thaïlande et de Malaisie, soit entre 1 et 2 millions d’individus dont, par définition, il est très difficile d’estimer le nombre. Enfin la base du recensement est foncièrement erronée. Conduit en 1983, le précédent recensement fut orchestré par le général Ne Win, un dictateur dont le numéro fétiche était le 9. Ce n’est pas un hasard si les 135 ethnies officiellement reconnues à cette époque – et excluant les Rohingyas – sont un multiple de 9. De là à ce que ce multiple soit l’idéal pour établir des projections de croissance qui se vérifient trois décennies plus tard, la preuve par 9 reste à faire.I Jack Thompson Nigeria: le chef de Boko Haram serait mort Est-il mort ? Est-il en vie ? Abubakar Shekau, qui se disait leader du groupe terroriste islamiste Boko Haram, aurait été tué au cours d’affrontements violents avec l’armée du côté de Konduga, une localité située sur la route de Maïduguri, capitale de l’État de Borno. Il y aurait eu plus de 130 morts et près d’une centaine de combattants se serait rendue aux militaires, avec leurs armes. C’est du moins ce qu’affirme l’état-major de l’armée, information reprise dans The Guardian, grand quotidien 5 Octobre 2014 G afrique asie …PROFIL BAS Ennahdha, mouvement islamiste tunisien affilié à l’Organisation mondiale des Frères musulmans, une internationale considérée comme terroriste dans de nombreux pays et dont le siège se trouve en Turquie, vient de s’assurer les services de la multinationale américaine Burson-Marsteller pour redorer son image en Occident et améliorer ses chances électorales en Tunisie même. Jusqu’ici, c’était la chaîne qatarie dominée par les Frères musulmans, Al-Jazeera, déclinante, qui assurait gratuitement la communication de ce mouvement. Reste à savoir qui va payer la facture, et combien cela coûtera.I Amama Mbabazi, présenté comme un rival potentiel de Yoweri Museveni à la présidentielle ougandaise de 2016, a été évincé brutalement de son poste de premier ministre. Il avait été démis sept mois plus tôt de ses fonctions de secrétaire général du parti présidentiel.I adversaires cherchent à torpiller sa candidature en rappelant son passé de putschiste. Berne et Ottawa l’ont d’ailleurs déclaré persona non grata… L’origine ouest-africaine du sortant Abdou Diouf joue en défaveur de l’exprésident malien par intérim, Dioncounda Traoré. L’ancien ministre des Affaires étrangères mauricien, Jean-Claude de l’Estrac, actuel président de la Commission de l’océan Indien, intéresse ceux qui voudraient voir l’OIF s’ouvrir à cette région, qu’il décrit comme « le nouveau cœur du monde », à l’intersection des pôles de croissance asiatique et Argentine: la justice anti-dictature poursuit son travail Pour la première fois, la justice argentine juge des personnels médicaux, médecins et infirmières ayant participé au vol ou à la mise au monde d’environ 500 bébés de détenues dans des maternités clandestines, entre 1976 et 1983. Une victoire pour l’association des Grands-mères de la place de Mai qui, depuis 1983, a identifié 115 des bébés volés. Ces enfants avaient été donnés à des familles de militaires ou de civils soutenant la dictature. Deux médecins et des militaires déjà condamnés, dont l’ex-dictateur Reynaldo Benito Bignone, se retrouvent aujourd’hui dans le box des accusés. Les mères des enfants volés font partie des « disparues », assassinées par les militaires.I D. R. nigérian indépendant. Abubakar Shekau a été donné pour mort plusieurs fois depuis 2009. Il était par ailleurs connu sous plusieurs noms différents, au point que nul ne sait plus exactement quelle est son identité pour l’état-civil. Il reste que les photos du cadavre qui ont été publiées ressemblent beaucoup à celles de l’individu qui se plaisait à être filmé avec ses otages. Parallélement, des négociations, tenues secrètes jusquelà, entre les autorités et Boko Haram auraient dû aboutir à la libération des 219 élèves enlevées, le 14 avril dernier, dans leur dortoir. Réunies sous l’égide de la Croix-Rouge internationale, les deux parties se sont mises d’accord pour l’échange des jeunes filles otages – dont certaines avaient réussi à s’échapper – contre dix-huit dirigeants de l’organisation terroriste détenus dans diverses prisons à travers le pays. Cet accord aurait dû être signé après consultation de leurs dirigeants par les deux camps.I africain. Il aura fort à faire face à l’ancienne gouverneure du Canada, la journaliste d’origine haïtienne Michaëlle Jean, qui a pour elle, du moins théoriquement, le soutien du deuxième bailleur de l’OIF après la France, avec plus du quart du budget de l’organisation.I F. M. D. R. 6 Continents Octobre 2014 G afrique asie Uhuru Kenyatta défie le TPI Accusé par la Cour pénale internationale de crimes contre l'humanité qui auraient été perpétrés pendant les violences postélectorales de 2007 (plus de 1 500 morts et plus de 300 000 déplacés), le président kényan, Uhuru Kenyatta, ne se rendra à La Haye le 8 octobre. Le 26 septembre, il a en effet signifié à la Cour qu’il ne pouvait pas être présent à la conférence de mise en état prévue ce jourlà pour préparer l'ouverture de son procès. Selon ses avocats, le président doit, en sa qualité de président en exercice de la Communauté d'Afrique de l'Est (EAC), présider ce même 8 octobre un sommet régional à Kampala, en Ouganda, et prendre part, le lendemain, aux festivités célébrant l’indépendance de ce pays voisin. Au cas où la chambre refuserait de l'excuser pour son absence à la conférence de mise en état, la défense du président, qui clame l’innocence de son client, a demandé que la réunion soit reportée et que Kenyatta puisse y participer par vidéoconférence. La CPI accédera-t-elle à cette requête ? Le bras de fer entre le chef de l’État kényan et la procureure de la Cour, la Gambienne Fatou Bensouda, a déjà provoqué la colère de l’Union africaine. Il ne semble pas près de s’arrêter.I Mali: pour une « décentralisation poussée » Le président malien Ibrahim Boubacar Keïta a déclaré à TV5 qu’il était favorable à une « décentralisation très poussée » et une « régionalisation » de son pays, proposition faite dans le cadre de la deuxième phase des négociations de paix à Alger entre Bamako et les groupes armés maliens, ouvertes le 1er septembre.I France24: la mauvaise foi des laudateurs du djihadisme Depuis que le directeur de la rédaction de France 24, Marc Saikali (photo), a envoyé aux journalistes un courriel on ne peut plus clair sur la ligne rédactionnelle concernant la couverture de l’irruption du mal nommé « État islamique » sur la scène médiatique et politique, il est la cible de nombreuses attaques. Elles viennent souvent de syndicalistes de RFI, plus animés par l’envie d’en découdre avec leur hiérarchie que de rappeler les bases élémentaires de la Sectes: la scientologie à l’assaut de l’Afrique L’Église de scientologie, fondée en 1954 par l’Américain Ron Hubbard, décriée pour sa politique de noyautage systématique des centres de pouvoir par les organisations antisectes, s’implante de plus en plus sur le continent africain. Déjà présente à Pretoria et Johannesburg, elle va construire d’autres églises d’ici à la fin 2015 en Afrique du Sud, au Cap, à Durban et à Port Elizabeth, ainsi qu’à Bulawayo (Zimbabwe). Elle compte aussi des missions à Lagos (Nigeria) et à Kisii (Kenya). L’une des tactiques employées par les scientologues consiste à dissimuler leurs opérations de propagande et de recrutement derrière la promotion des droits de l’homme. En témoigne le 11e sommet de l’organisation satellite, Jeunes pour les droits de l’homme, les 5 et 7 septembre dernier à Bruxelles, auquel ont participé nombre de représentants africains provenant notamment de République centrafricaine, du Liberia, du Maroc, du Cameroun et de la République démocratique du Congo. Ce dernier pays fait l’objet d’une attention toute particulière. Le représentant de l’Amicale des jeunes Congolais Bomoko, Blaise Tshidinda, a en effet été nommé « ambassadeur de la paix » par la scientologue Mary Shuttleworth (photo), président des Jeunes pour les droits de l’homme, maître de cérémonie d’un vaste forum organisé en avril 2014 à Port Harcourt (Nigeria). Là-bas, pour séduire les jeunes Africains, les organisateurs n’ont pas hésité à mettre en avant des photos de Lumumba et de Nkrumah.I F. M. Terrorisme: l’Union africaine se « bouge » enfin! Avant même que le ressortissant français Hervé Gourdel soit assassiné en Algérie le 24 septembre près de Tizi Ouzou, le terrorisme était devenu un enjeu de sécurité majeur pour l’Afrique. Martin Eli, chercheur au sein de l’Institut d’étude de sécurité (ISS), estime que plus de 10000 actes de terrorisme ont été commis sur le continent entre 1970 et 2014. Or, ces dix dernières années, la Commission de l’Union africaine (UA) n’a consacré que cinq séances spéciales à ces problèmes. Le Conseil de paix et de sécurité de l’UA a donc décidé de se saisir lui-même et en priorité de toutes les questions liées à Boko Haram au Nigeria et au Cameroun, aux shebab en Somalie, à Al-Qaïda au Maghreb islamique et ses affidés.I D. R. Au moindre dérapage, je serai intransigeant. Notre devoir est de lutter contre eux. Tout le temps. » Si ce mail, qui a le mérite de la clarté et de l’audace, est de nature à susciter un vrai débat salutaire sur le rôle des médias en temps de guerre, pourquoi pas. Les réactions à ce texte sont certes justifiées et justifiables, mais ce qui l’est moins, c’est le silence de ces mêmes syndicalistes « offusqués », quand les deux anciennes directrices de la rédaction de France 24 et de RMC arabe (qui fait partie de RFI), Nahida Nakad et Mouna Al-Banna, ont établi une liste de personnalités à ne plus inviter sur les plateaux de ces deux médias pour La NSA complice des crimes israéliens En transmettant des informations brutes aux services de renseignement israéliens, l’Agence nationale de sécurité américaine (NSA) est complice des crimes d’Israël contre les Palestiniens. Ces informations obtenues par le réseau international d’écoutes, dénoncé par l’ex-consultant de la NSA, Edward Snowden (aujourd’hui réfugié en Russie), sur WikiLeaks, concernent l’espionnage systématique de civils palestiniens dans et hors des territoires occupés, donnant des renseignements allant jusqu’à l’orientation sexuelle ou la vie conjugale. Le 12 septembre, quarante-trois réservistes de la prestigieuse unité des renseignements israéliens, U8200, ont adressé une lettre au premier ministre et au chef d’état-major israéliens, accusant les 7 Octobre 2014 G afrique asie « mal-pensance ». Une liste noire heureusement supprimée dès la nomination de MarieChristine Saragosse à la présidence du holding Audiovisuel extérieur de la France (AEF) et de Marc Saikali à la direction de la rédaction de France24.I D. R. Burkina: la dernière trouvaille de Blaise Alors que l’opposition lui demande depuis des mois de ne pas toucher à la Constitution pour pouvoir se représenter à la présidentielle de 2015, le président Blaise Compaoré multiplie les stratagèmes pour gagner du temps. Après avoir sorti l’idée d’un référendum pour départager son camp, qui l’appelle à faire sauter le verrou de la limitation du nombre de mandats, et les partis d’opposition, qui refusent toute idée de consultation électorale sur le sujet, Compaoré a trouvé, fin septembre, une solution originale. Il a réuni à son palais de Kosyam opposition et majorité pour leur proposer de jouer les médiateurs, devenant ansi l’arbitre d’un conflit entre ses partisans et ses pourfendeurs!I services de renseignement d’« abus » envers la population palestinienne. Ils disent leur refus de « servir un système qui porte atteinte aux droits de millions de personnes » et qui font d’eux « les instruments du régime militaire dans les territoires occupés ». Ils appellent leurs collègues des services à « faire entendre leur voix contre ces injustices et à agir pour y mettre un terme ». « Nous pensons que le futur d’Israël en dépend », concluent-ils. De leur côté, les ONG de défense des droits de l’homme en Israël et dans les territoires occupés, Yesh Din et BTselem, ont dénoncé la pseudo enquête sur quatre-vingt-dixneuf cas; ouverte par les autorités militaires israéliennes concernant des « incidents irréguliers » et menée « par l’armée sur sa propre conduite, sans être supervisée par des personnes extérieures à l’armée », dans le cadre de l’opération « Barrière de protection » contre Gaza.I déontologie que tout journaliste est censé respecter. Surtout dans un média qui se définit comme relevant du service public français. Qu’a dit Marc Saikali pour mériter ces cris d’orfraie? « Après mûre réflexion, écrit-il dans un mail à usage interne, je suis arrivé à la conclusion que nous devons sortir d’une sorte de neutralité stupide. Nous devons, sur nos antennes, avec nos invités, dans nos débats, ouvertement prendre parti contre ces barbares. Je vous demande donc de veiller à chaque mot, chaque plan. Les images que nous diffusons avec des drapeaux noirs flottant au vent et de jeunes gens en pleine santé doivent obligatoirement être soumises au synthé: vidéo de propagande.Y compris en arabe. […] Ces gens-là sont la négation de tout ce en quoi nous croyons. La ligne éditoriale de la chaîne est claire: ce sont des terroristes et des barbares. J’attire particulièrement l’attention du booking sur les invités. Je ne veux plus voir un seul crétin qui justifierait les actions de ces sauvages sous prétexte politique sunnite-chiite. Pour une fois, il y a les gentils et les méchants! Eux, sont les pires ennemis de notre civilisation. Nous allons devoir gérer leur existence pour au moins cinq ans. D. R. 8 Continents Octobre 2014 G afrique asie Khartoum/Téhéran: au-delà du prosélytisme Les relations diplomatiques entre le Soudan du Nord et l’Iran sont-elles au bord de la rupture? C’est la question qui s’est posée après la brusque annonce faite par les autorités de Khartoum de fermer le Centre culturel iranien et toutes ses représentations dans le pays. Officiellement, il s’agit d’une mesure venant sanctionner un trop grand prosélytisme des Iraniens chiites à l’endroit des Soudanais sunnites. Des jeunes auraient même reçu de l’argent pour se convertir. Certains groupes salafistes, financés par l’Arabie Saoudite, ont manifesté leur colère face à ce qu’ils ont décrit comme « une menace » envers l’islam sunnite dans le pays. Une « colère » feinte, attisée par un reportage publié sur la chaîne égyptienne Al-Hayat. En réalité, le Soudan représente depuis les années 1980 une plateforme de transit pour les Iraniens, et notamment pour leurs envois d’armes en direction du Hamas et de la bande de Gaza. Il maintient des relations économiques et politiques avec le Qatar, dont les relations avec Riyad sont détestables. La guerre larvée de l’Égypte, soutenue par l’Arabie Saoudite, contre l’organisation internationale des Frères musulmans, proche du parti au pouvoir à Qatar: retraite de Syrie et d’Égypte? Le soutien de l’ancien émir du Qatar aux mal nommés printemps arabes, et surtout à la rébellion syrienne et aux Frères musulmans en Égypte, a failli mener à l’éclatement du Conseil de coopération du Golfe. L’Arabie Saoudite, le Bahreïn et les EAU, qui avaient banni les Frères musulmans et soutenu à fond le coup d’État militaro-populaire du maréchal égyptien Al-Sissi, ont menacé de rompre leurs relations diplomatiques avec Doha si le nouvel émir Tamim (photo, à droite) persévérait dans cette voie. Tamim, plus pragmatique que son père – qui semble encore influencer l’orientation diplomatique de cet émirat –, a fini par céder. Du moins en apparence. L’expulsion de sept dirigeants des Frères musulmans de Doha (vers la Turquie ?) a été interprétée comme un geste de bonne volonté envers l’Égypte, mais aussi envers le frère ennemi saoudien. La guerre féroce que se livraient Doha et Riyad par mouvements rebelles syriens interposés semble elle aussi prendre fin. Le nouvel émir cherche manifestement à se désengager du conflit syrien, le léguant à son allié turc. Conscient des ennuis que son soutien à des mouvements rebelles figurant sur la liste américaine du terrorisme, comme le Front d’Al-Nosra, pourrait lui causer, il réduit ses ambitions diplomatiques. Mais pour que cette nouvelle orientation soit crédible, il lui reste à calmer les ardeurs de Cheikh Youssef al-Qaradhawi, qui officie toujours sur Al-Jazeera, et à infléchir la ligne éditoriale de cette chaîne qui excelle dans l’agit’prop. En lançant un nouveau projet médiatique (Al-Arabi al-Jadid) comprenant un quotidien, un site Internet et une chaîne télé depuis Londres, dirigé par l’ancien membre palestinien de la Knesset israélienne, Azmi Bichara, il paraît vouloir contrebalancer Al-Jazeera, qui n’a plus la cote auprès du public arabe.I Litige frontalier: la Côte d’Ivoire et le Ghana au tribunal Malgré plusieurs réunions mixtes consacrées au règlement à l’amiable du litige frontalier maritime opposant les deux pays, la Côte d’Ivoire et le Ghana devraient se retrouver prochainement devant le Tribunal international du droit de la mer (TIDM). Les autorités ghanéennes auraient en effet décidé, selon des sources indépendantes, de porter le différend devant cette juridiction internationale, dans l’espoir qu’elle rende un verdict définitif délimitant clairement une frontière maritime devenue stratégique depuis la découverte de pétrole dans ces eaux il y a sept ans et son entrée en production en 2011.I Khartoum, est pour quelque chose dans cette décision brutale. Selon des informations émanant des cercles du pouvoir au Soudan, c’est le tout-puissant prince saoudien Muqrin Ben Abdulaziz, deuxième vicepremier ministre et probable futur roi d’Arabie, qui aurait contacté le président Omar al-Bachir pour lui demander de fermer les représentations culturelles iraniennes. Ce que ce dernier a fait le jour même. Une décision qui a surpris les milieux militaires et sécuritaires soudanais, dont les liens avec l’Iran sont très solides. Même si le Qatar reste le premier investisseur arabe au Soudan, un pays durement frappé par les sanctions financières américaines, le fait que l’Arabie Saoudite abrite une colonie soudanaise de quelque 1,5 million de personnes, assurant l’essentiel des transferts vers leur pays d’origine, a joué dans cette décision somme toute symbolique. L’Iran a réagi en décidant de fermer l’école soudanaise à Téhéran, sans toutefois traduire cette mesure dans les faits.I Contrat nucléaire Russie-Afrique du Sud La compagnie russe Rosatom Satate Atomic Energy Corporation et l’Afrique du Sud ont signé un contrat de 50 milliards de dollars pour la construction de huit réacteurs nucléaires D. R. d’ici à 2023. C’est la première fois que la technologie nucléaire russe entrera sur le territoire sudafricain. Signé à Vienne fin septembre, en marge de la conférence de l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA), l’accord prévoit, également, la participation de la Russie dans la construction d’infrastructures pour lesquelles le gouvernement sud-africain peine à convaincre les investisseurs étrangers, et la formation de spécialistes dans les universités russes. La construction des réacteurs devrait aussi permettre de créer des milliers d’emplois et profitera à l’industrie locale. L’Afrique du Sud, qui souffre d’un manque d’énergie paralysant régulièrement les activités tant domestiques qu’industrielles, a longtemps négocié avec le géant français du nucléaire Areva et le groupe américanojaponais Westinghouse avant de signer avec la Russie.I Les conseils de papy Kissinger Vers la fin de la guerre Iran-Irak (1981-1988), qui s’était soldée par plus d’un million de morts, Henry Kissinger (photo), l’ancien conseiller à la Sécurité puis secrétaire d’État américain sous Nixon, écrivit dans une célèbre tribune parue dans l’International Herald Tribune: « La meilleure issue de cette guerre serait que les deux pays se détruisent mutuellement. Mais si l’Irak s’en sortait gagnant, ce serait une catastrophe pour les ÉtatsUnis. » Aujourd’hui, âgé de 91 ans, Kissinger récidive. Il vient de demander à Obama, dans une interview accordée à la radio américaine NPR (http://www.npr.org), d’ordonner le bombardement massif des objectifs les plus connus de l’État islamique, et de ne « pas faire de distinction entre la Syrie et l’Irak ». Cela dit, il considère que l’Iran est un pays qui pose plus de problèmes que l’EI, un « groupe d’aventuriers avec une idéologie très Scission chez les taliban pakistanais Les taliban de la province du Pendjab, au Pakistan ont annoncé la fin de la lutte armée pour le pouvoir. Rappelons qu’ils sont une composante essentielle de Tehrik-eTaliban Pakistan (TTP) qui fédérait les djihadistes du pays. Le leader Asmatullah Muavia, un des principaux dirigeants des Pendjabis, a aussi conseillé aux autres groupes islamistes de cesser leurs activités djihadistes, comme lui et ses militants l’ont fait, et de passer au prêche pour propager l’islam (tableegh). Muavia demande également au gouvernement pakistanais, ainsi qu’aux autres djihadistes, de secourir les centaines de milliers de personnes ciblées par 9 Octobre 2014 G afrique asie les drones américains et déplacées du fait de la guerre que livre l’armée pakistanaise aux « terroristes ». Muavia et d’autres responsables djihadistes étaient entrés en dissidence contre la direction de TTP et participaient déjà au dialogue lancé par le gouvernement. Le Pakistan doit être défendu, a dit Muavia. En revanche, dans l’Afghanistan voisin, la lutte devra continuer contre les Américains et leurs alliés. Lui et les siens considèrent désormais le chef des taliban afghans, Mullah Mohammed Omar, comme leur leader suprême. Des liens avec l’État islamique, qui veut s’étendre vers l’Asie du Sud? Ou avec Al-Qaïda d’Ayman Zawahiri, qui vise à créer des sections en Inde? Attendons de voir.I Salil Sarkar RDC: protéger les enfants Le Conseil de sécurité des Nations unies a décidé, le 17 septembre dernier, d’étendre les sanctions prévues par la résolution 1533 de 2004 – gel des avoirs et interdiction de voyager. Elles avaient été prises à l’encontre des chefs de guerre, « personnes et entités » qui recrutent ou emploient des enfants dans le conflit armé sévissant toujours dans l’est du pays. Sont également concernés tous ceux qui planifient, donnent les ordres ou participent aux « actes de violence graves dirigés contre des enfants ou des femmes », y compris les mutilations, violences sexuelles et enlèvements, ainsi que les attaques contre des écoles ou des hôpitaux. Reste à savoir si une telle mesure peut être suivie d’effets sur le terrain.I agressive », selon lui, qui devra conquérir « plus de territoires avant de devenir une réalité stratégique ». Un conflit avec l’État islamique est, dit-il, « plus facile à gérer qu’une confrontation avec l’Iran ».I D. R. D. R. 10 Courrier Octobre 2014 G afrique asie Libye, les casseurs doivent payer! C e sont justement les interventions étrangères qui ont foutu le chaos en Libye, et notre pays, l’Algérie, a totalement raison de dénoncer toute intervention étrangère. Si les va-t-en-guerre franco-britanniques avaient écouté à l’époque les conseils de l’Algérie et de l’Union africaine, qui prônaient une transition apaisée avec toutes les composantes de la société libyenne, on n’en serait pas là. À l’époque, un certain Alain Juppé, ministre français des Affaires étrangères de Sarkozy et aujourd’hui candidat à la candidature de la prochaine présidentielle de 2017, était venu à Alger, droit dans ses bottes, pour promouvoir sa guerre contre la Libye en 2011 au nom de la démocratie, des droits de l’homme et d’un certain islam politique. Il a été certes poliment écouté, courtoisie oblige, mais fermement éconduit. Car on n’instaure pas une démocratie, dans un pays aussi fragile et composé de près de 2000 tribus et clans, à la baïonnette ou avec le concours de barbus qui considèrent l’idée même de démocratie comme une hérésie occidentale. Maintenant que le mal est fait, la question est: comment recoller les morceaux? On revient donc à l’approche algérienne: dialogue et réconciliation, sans exclusive. Plus facile à dire qu’à faire, car le pays échappe désormais à tout contrôle. Il est infesté, comme la Syrie et l’Irak, de groupes non libyens qui font tous les acteurs du drame libyen. Le seul pays capable de l’accueillir est l’Algérie, qui n’a d’ennemi que le terrorisme et qui a un savoir-faire remarquable en matière de faiseurs de paix et de réconciliation nationale. Comme c’est le cas actuellement avec les Maliens. Une fois cette réconciliation engagée, il faudra que ceux qui avaient cassé cet édifice, les casseurs et les voyous, paient des indemnités à ce malheureux pays martyrisé.I Mostafa Idrissou, Dakar. Israël a-t-il du gaz ou du vent à vendre à la Jordanie? S elon certains médias, « Israël serait en passe de devenir le principal fournisseur d’énergie de la Jordanie, avec la signature d’un accord d’intention de 15 milliards de dollars (soit environ 11,4 milliards d’euros). La société israélienne Noble Energy devrait ainsi fournir près de 45 milliards de mètres cubes de gaz naturel provenant du champ gazier de Léviathan à l’entreprise nationale d’électricité du royaume hachémite (l'Electric Power Company) sur quinze ans. » Esbroufe! Ce qui est un protocole d’intention, nécessitant encore une ratification en Jordanie et en Israël, est présenté comme un contrat signé, une réalité qui fait déjà qu’« Israël devient un fournisseur principal d’énergie de la Jordanie ». Un peu de sérieux. Avec ce genre de distorsion sémantique, je comprends que M. le professeur Gilles Kepel puisse répéter Dessin de Plantu dans Le Monde Maroc: faute militaire ou politique? J e suis effaré par cette information qui nous apprend que l’armée marocaine déploie des missiles sol-air en plein centre ville. C’est une aberration en même temps qu’une faute militaire grave. Premièrement, parce que dans un centre ville, il est quasi impossible de trouver des fenêtres de tir permettant de cibler des engins évoluant à basse altitude. Un tir massif risque plus d’abattre des immeubles que des avions, surtout dans une ville comme Casablanca. Pour protéger une ville de cette importance, il est indispensable de déployer les engins sol-air à la périphérie de la métropole et dans la direction prévisible de l’origine de l’attaque, l’ennemi devant être abattu dès l’approche de son objectif. Deuxièmement parce qu’en cas d’attaque aérienne, les bases de missiles seront les premières cibles visées, et si ces dernières se situent au centre de l’agglomération, leur destruction par l’ennemi entraînera ipso facto un nombre important de victimes parmi la population civile. Cette manière de mener la défensive est digne de petits aspirants boutonneux à peine sortis de l’école militaire, et non de généraux forgés à l’art de la guerre.I Omar Barkat, Rabat. également le jeu de puissances étrangères. On les arme pour mieux dresser tout ce beau monde et empêcher toute stabilité de ce pays. Non rassasié du sang des Libyens qu’ils ont fait couler à flots pour mieux contrôler les richesses pétrolières du pays et lui fourguer des Rafale que personne ne veut, les revoilà qui reviennent à la charge pour essayer une stratégie qui a foiré: une intervention militaire, comme l’avait sousentendu le ministre français de la Guerre! Rien de moins! Plutôt que d’intervention militaire sans lendemain, qui ajoute le malheur au malheur, il faut encourager une table ronde regroupant 11 Dérisoire La défense des chrétiens d’Orient menacés d’être déracinés des terres de leurs ancêtres vaut bien mieux qu’une vague compassion exprimée ici et là dans les journaux télévisés européens et américains aux heures de grande écoute, et bien mieux que de devenir le paravent derrière lequel se cachent des agendas inavouables. Victimes de hordes fanatisées et frappées d’amnésie quant à la légitimité et au rôle historique éminent de ces Arabes dans la promotion de la culture, de la spiritualité et de la modernité du monde arabe. En Irak, au Liban, en Syrie en Jordanie ou en Égypte, ils sont chez eux tout autant que les musulmans, sur ces terres que de nouvelles velléités colonisatrices et hégémoniques veulent morceler et vouer aux épurations ethniques et autres massacres. C’est sous l’égide américaine que clans, tribus et ethnies ont été réactivés dans le monde arabe pour abattre les Étatsnations. Le résultat est plus que catastrophique. Ce qui vaut pour les chrétiens d’Irak et de Syrie vaut autant pour les Palestiniens, chrétiens et musulmans, que les sionistes israéliens veulent arracher à leur terre et réduire à la condition d’apatrides. Les deux causes doivent être défendues avec la même vigueur ; au nom des droits de l’homme, bien sûr, mais aussi de la liberté de conscience et du droit de chaque peuple à ses racines, dans une région qui n’en a que plus qu’assez de l’accumulation des sinistrés et des réfugiés pourchassés par les exactions et les guerres, laissés-pourcompte d’une histoire cruelle.I Relais La langue française et son pendant géopolitique, la francophonie, comme relais et vecteur de croissance pour la France en Afrique et au Maghreb, c’est ce que Jacques Attali, gourou tout à la fois de la gauche et de la droite française, vient de préconiser dans un rapport volumineux remis à l’Élysée. C’est un des rares leviers de croissance qui reste à Paris pour faire face à son déclin économique. Au même moment, de l’autre côté de l’Atlantique, des économistes américains de renom affirment que l’informatique et les technologies de l’information et de la communication ayant épuisé en vain leur potentiel de développement, et faute d’innovations majeures dans un avenir proche, la croissance européenne a toutes les chances de stagner dans les prochaines années à un niveau ne dépassant guère 1 % de progression par an. Soit beaucoup moins que le niveau nécessaire requis pour réduire un chômage de masse désormais envahissant. Alors la francophonie, pourquoi pas? L’idée n’est sans doute pas à dédaigner. Encore faut-il la sortir de l’unilatéral pour l’intégrer dans un projet « gagnant-gagnant », afin qu’elle n’apparaisse pas d’emblée comme la résurgence d’une forme nouvelle de domination culturelle et économique pour le XXIe siècle.I Excuses Plusieurs gazettes britanniques rapportent que les autorités saoudiennes ont présenté leurs plates excuses au gouvernement britannique, après qu’un des ressortissants de Grande-Bretagne eut été violenté dans un supermarché de la capitale saoudienne par la police religieuse de ce pays. Il faut espérer que le chef de la patrouille gardienne de la morale intégriste aura reçu le châtiment qu’il mérite, à moins qu’il n’ait été muté dans un quartier obscur et éloigné du pays. Il aura alors tout loisir, comme à l’accoutumée dans ce royaume où la police religieuse est au-dessus de tous et de toutes les lois, de harceler, d’humilier et de punir Saoudiens et Saoudiennes sans craindre les projecteurs de la presse ni le courroux de ses chefs. Car sur la balance politique de ce royaume obscurantiste, un Britannique pèse plus que plusieurs millions de Saoudiens.I Contrepointspartout que la dimension pétrolière et gazière des problèmes du MoyenOrient n’est plus si importante que cela. Alors que c’est complètement faux, même l’Agence internationale de l’énergie (AIE) le dit: la clé de l’économie énergétique globale restera au MoyenOrient qui, seul – et surtout l’Irak –, détient des gisements de pétrole pas cher. Vu le coût d’exploitation prévisionnel du gaz en eaux profondes sur le site dit Léviathan, le protocole d’accord n’a de chances de se transformer en contrat à long terme que si, et seulement si, les prix du pétrole et du gaz ne redescendent pas en dessous de 50 dollars/équivalent baril. Ce qui est possible puisque le prix de revient en Irak est de 4 dollars/baril, possible et probable si l’Irak redevient libre de ses décisions et reste uni. Et encore plus si un Iran libre à nouveau, un Irak libre et calme à nouveau et le Qatar s’entendent pour investir ensemble dans un gazoduc depuis les champs gaziers du Golfe, à travers les champs irakiens, puis les champs futurs de la Syrie du nord-est, vers la Méditerranée à travers la trouée de Homs redevenu calme et libre d’influences étrangères. Alors le gaz de Léviathan n’aura guère de chances d’être produit, à part pour remplacer peu à peu le charbon qui alimente la centrale de Haïfa, et aucune chance d’être exporté. Comprenne qui voudra.I Bernard Cornut, polytechnicien, ingénieur civil du génie rural, eaux et forêts, quatorze ans de résidence dans six pays de l’ex-Empire ottoman, expert efficacité énergétique et environnement, Paris. Octobre 2014 G afrique asie Par Hassen Zenati D.R.
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